Actualité

30 juillet 2024 - Actualités

Biomasse : les alternatives au bois comme chaleur renouvelable

De nombreuses collectivités, dans leur quête d’indépendance énergétique et de verdissement de leurs usages énergétiques, cherchent à exploiter les énergies renouvelables locales, garantissant une stabilité de prix et une ressource facilement disponible. C’est dans cet esprit que des gisements biomasse alternatifs au bois énergie voient le jour, l’occasion de les mettre en lumière.

Les co-produits de l’agriculture mobilisables

 

Ressource biomasse valorisable énergétiquement et issue de l’exploitation agricole, la paille désigne la section des tiges de certains graminées (blé, orge, seigle, riz…) et dont les usages sont aujourd’hui essentiellement agronomiques (fourrage, retour au sol avec le fumier, paillage etc…).

 

Néanmoins, de nouveaux débouchés émergent avec le développement des filières énergétiques et construction comme son usage en chaufferie après broyage.

 

Des collectivités se sont déjà emparées de cette ressource comme la Ville de Troyes avec la mise en service d’une chaufferie bois/paille en 2013 afin d’alimenter son réseau de chaleur. Ainsi, 4000 tonnes de paille (et 10 000 tonnes de bois) sont consommées annuellement par la chaufferie ce qui ne représente qu’1% de la production annuelle de paille du département.

 

D’autres ressources plus spécifiques sont mobilisables comme les anas de lin, partie ligneuse de la tige non utilisée par l’industrie textile. La France, premier producteur mondial de lin, possède d’ores et déjà les débouchés pour utiliser les coproduits de cette industrie comme la production de panneaux, de litières animales ou d’isolants. Sa valorisation énergétique dans un contexte d’accroissement de la demande en produits biosourcés et donc en lin, prend alors tout son sens. De plus, le haut PCI des anas de lin et sa faible masse volumique en font un combustible de choix, facilement stockable et qui lui permets d’être compétitif face au bois. Ainsi, la Communauté de Communes des Hauts de Flandre (CCHF) a fait le choix de mobiliser ce gisement en dotant la commune de Wormhout d’une chaufferie bois/anas de lin produisant 2 400 MWh de chaleur en ne mobilisant que 790 t de la production totale d’anas de lin des 6 teilleurs des Hauts de Flandre (50 000 tonnes par an au total). La mixité de la chaudière permettant la combustion de bois, la collectivité possède alors une grande flexibilité dans ses choix d’approvisionnement.

 

Il est également possible de collecter les résidus de maïs, parties aériennes de la plante issues de son exploitation et pouvant être broyés pour former un combustible aux caractéristiques similaires à la paille céréalière.La chaufferie bois/rafles de maïs du réseau Strasbourgeois de Wacken est par ailleurs consommatrice de cette ressource depuis 2014. Ainsi, une chaudière bois de 3,2 MW et une de rafle de maïs de 2 MW produisent l’équivalent de 30GWh/an de chaleur représentant la consommation de 8 000 tonnes de bois et 3 000 tonnes de rafles de maïs annuellement.

 

Le miscanthus : le développement de la culture énergétique

 

Les cultures énergétiques sont aussi une alternative pour s’assurer un gisement de biomasse mobilisable à moindre coût et dont l’entretien et la collecte sont facilités. L’exemple le plus connu de culture énergétique est le miscanthus une plante prisée par les collectivités étant donné ses nombreux avantages. En effet, cette plante demande un entretien limité une fois sa maturité atteinte et ne nécessite aucun ajout de produite phytosanitaire. Sa faible demande en eau, sa faculté à limiter l’érosion des sols et le ruissellement des eaux ainsi que sa capacité à filtrer les substances actives de l’eau laissés par les produits sanitaires, font du miscanthus un allié écologique pour les territoires. Avec un PCI moyen de 5 MWh/t, le miscanthus possède une capacité énergétique comparable aux combustibles bois plus traditionnels et propose un rendement de culture intéressant avec 10 à 20 t de matière par hectare.

 

C’est pourquoi cette plante est bien souvent placée à proximité des captages d’eau potable pour améliorer la qualité de l’eau comme c’est le cas sur la commune d’Hangest-sur-Somme. Le réseau de chaleur communal est alimenté par une chaudière miscanthus de 100 kW depuis 2013, ce qui représente un gisement de 60 t de miscanthus produits sur 5,2 ha.

 

Quelle place pour les ressources biomasse moins connues ?

 

Au vu des tensions émergentes sur la ressource bois et les nombreuses attentes pour ce combustible, l’exploration de nouveaux types de biomasse est à promouvoir afin de soulager la filière. Le sujet de la bouclage biomasse fait l’objet d’une nouvelle publication de la part du Secrétariat Général à la Planification Écologique (SGPE). Ce document rappelle que les ressources biomasse sont multiples et renouvelables mais que le développement en lien avec la transition énergétique peut conduire à des conflits d’usage. Ceci amène le SGPE à définir un merit order des usages de la biomasse qui se décline avec :

 

  • Des usages à considérer en priorité
  • Une utilisation raisonnable et sous conditions
  • Un développement à modérer

 

L’alimentation humaine reste prioritaire, mais les réseaux de chaleur sont classés dans les usages à considérer en priorité.

La priorisation des usages au sein même de la filière biomasse ne doit pas s’arrêter à la filière forêt/bois seule mais bien à ces usages émergents. La volonté de l’État de protéger les forêts françaises se ressent par la baisse des soutiens financiers alloué à cette ressource comme évoqué dans un précédent article d’où l’importance d’explorer de nouvelles ressources biomasse. 

 

Valoriser ces ressources alternatives, c’est également soutenir le développement de la filière tout entière en garantissant des débouchés et des revenus complémentaires aux agriculteurs et industries concernées. Cependant, AMORCE alerte quant au développement rapide de la filière énergie comparativement aux débouchés de valorisation matière. Les tonnages de matière résiduels agricoles présentés et non utilisés sont aujourd’hui très mal connus et nécessitent un travail conjoint entre agriculteur et professionnels de la filière pour mieux caractériser le gisement disponible. 

 

Enfin, AMORCE appelle les collectivités à se mobiliser sur ces ressources alternatives afin d’aider la filière à sortir de sa vision compartimentée et d’impliquer tous les acteurs concernés par la gestion, mobilisation et utilisation de ces gisements. AMORCE intègre les partenaires du Groupement d’Intérêt Scientifique monté par l’État, l’ADEME et France Agri Mer sur ce sujet. Nous ne manquerons pas de vous tenir informés des avancées de ce travail.

 

Contact : Thibault MARTINAND